5  Exponentielle et logarithme

5.1 Atelier : calculer avec des puissances

Notation : la multiplication est notée \(*\), comme dans les langages informatiques.

Definition 5.1 (Fonction puissance) La fonction \(\puissance{}\) à deux paramètres, un réel \(x\) et un entier naturel \(n\), est définie ainsi :

\[ \puissance{} (x, n) = \underbrace{x * \ldots * x}_{n \textrm{ occurrences de } x}. \]

L’expression \(\puissance{} (x, n)\) est notée aussi \(x^n\) et se lit “\(x\) à la puissance \(n\)”. \(n\) est appelé l’exposant et \(x\) la base. Pour éviter des irrégularités, on impose \(x \neq 0\). En effet, comme on réalise des multiplications par \(x\), nous allons aussi recourir à l’inverse de \(x\), qui est défini lorsque \(x\neq 0\).

Exercise 5.1 (Implémentation en Python) Implémenter1 la fonction \(\puissance{}\) en Python.

def puissance(x, n) :
    r = 1
    for i in range(0, n) : # 0, ..., n-1, soit n valeurs au total
        r = x * r
    return r

# test
print("2^10 : " + str(puissance(2, 10)))
print("2^0 : " + str(puissance(2, 0)))
2^10 : 1024
2^0 : 1

Nous nous intéressons aux lois algébriques2 vérifiées par la fonction \(\puissance{}\). Pratiquement, les lois algébriques pour une fonction se présentent principalement sous la forme d’identités induites par des propriétés de morphisme. Un morphisme est une fonction qui préserve la structure des calculs, notamment qui peut se distribuer sur les opérations. Voici quelques exemples.

\[ \begin{array}{rclcl} f(x) & = & 3 * x &\quad & \textrm{définition,}\\ f(x + y) & = & f(x) + f(y) && \textrm{morphisme additif,}\\ f(x * y) & = & x * f(y), && \textrm{morphisme / }\\ & = & y * f(x) && \textrm{multiplication par scalaire.}\\ \hline g(x) & = & x^2 & & \textrm{définition,}\\ g(x + y) & = & g(x) + g(y) + 2 * x * y && \textrm{pas de morphisme additif,}\\ g(x * y) & = & g(x) * g(y) && \textrm{morphisme multiplicatif.}\\ \end{array} \]

On peut aussi représenter les identités par des schémas comme celui présenté dans la Figure 5.1. Les entrées sont représentées par le symbole ◡, alors que les sorties sont représentées par ◠.

stateDiagram-v2
    state "=" as egal
    FSomme --> egal
    FSomme: f(x+y)
    state FSomme {
        state "◡" as e1
        state "◡" as e2
        state "+" as s
        state "f" as f
        state "◠" as r

        e1 --> s
        e2 --> s
        s --> f
        f --> r 
    }

    SommeF --> egal 
    SommeF: f(x) + f(y)
    state SommeF {
        state "◡" as e3
        state "◡" as e4
        state "f" as f3
        state "f" as f4
        state "+" as s2
        state "◠" as r2

        e3 --> f3
        e4 --> f4
        f3 --> s2
        f4 --> s2
        s2 --> r2 
    }

Figure 5.1: Morphisme additif

Dans la suite, on cherche à déterminer toutes les lois algébriques de la fonction \(\puissance{}\) et à les démontrer.

Exercise 5.2 (Définition récursive) Un entier naturel est soit égal à \(0\), soit égal au successeur \(\succ{}(n)\) d’un entier naturel \(n\), soit \(n+1\). Étudier les deux cas de la décomposition.

  • En \(0\) : \(\puissance{}(x, 0) = \ldots\) ?
  • En \(\succ{}(n)\) : \(\puissance{}(x, n+1) = \ldots\) ?

En déduire une seconde implémentation de \(\puissance{}\), sur le modèle de la définition d’une suite récurrente. Cette implémentation est dite récursive.

Conformément à la définition initiale et à son implémentation, on peut énoncer :

\[ \begin{array}{rcl} \puissance{}(x, 0) & = & 1, \\ \puissance{}(x, n+1) & = & x * \puissance{}(x, n).\\ \end{array} \]

Lorsque l’exposant est l’élément neutre de l’addition, le résultat est l’élément neutre de la multiplication. Quant au successeur \(\succ{}(n)\), soit \((n+1)\), il se traduit par la multiplication par \(x\). Dans les deux cas, la fonction \(\puissance{}\) se comporte comme un morphisme. On remarque aussi que cette définition étendue en \(x = 0\) donne \(\puissance{}(0, 0) = 1\) ; c’est la convention naturelle avec cette définition.

Étant donné un réel \(x\), si on définit explicitement la suite \((u_n)\) par \((u_n = \puissance{}(x, n))\), on s’aperçoit que la définition précédente est équivalente à la définition implicite suivante de la suite \((u_n)\) :

\[ \begin{array}{rcl} u_0 & = & 1, \\ u_{n+1} & = & x * u_n.\\ \end{array} \]

Cette suite récurrente d’ordre un est une suite géométrique de raison \(x\) et de premier terme \(1\). A vrai dire, cette définition récurrente est la définition mathématique de la fonction \(\puissance{}\) : elle permet d’éviter l’imprécision des points de suspension utilisés dans la définition initiale, qu’on peut à ce stade qualifier de naïve.

Une suite récurrente peut être implémentée très facilement en Python en utilisant une fonction récursive.

def puissanceRec(x, n) :
    if(n == 0) : ## == ? test de l'égalité entre n et 0
        return 1
    else : # n > 0
        return x * puissanceRec(x, n-1) # Appel récursif comme dans la définition récurrente

# test
print("2^10 : " + str(puissanceRec(2, 10)))
print("2^0 : " + str(puissanceRec(2, 0)))
2^10 : 1024
2^0 : 1

Exercise 5.3 (Lois pour la base) Étudier la préservation de la structure algébrique de la base (le premier argument de la fonction \(\puissance{}\)).

  • Addition pour la base : \(\puissance{}(x + y, n) = \ldots\) ?
  • Multiplication pour la base : \(\puissance{}(x * y, n) = \ldots\) ?
  • Opposition pour la base : \(\puissance{}(-x, n) = \ldots\) ?
  • Inversion pour la base : \(\puissance{}(1/x, n) = \ldots\) ?

\[ \begin{array}{rcl} \puissance{}(x + y, n) & = & \Sigma_{k=0}^n \binom{n}{k} * x^k * y^{n-k},\\ & = & \Sigma_{k=0}^n \binom{n}{k} * x^{n-k}*y^k.\\ \end{array} \]

Le développement de \((x+y)^n\) se réalise en choisissant \(n\) fois \(x\) ou \(y\) : si on choisit \(k\) fois \(x\), c’est qu’on a choisi \((n-k)\) fois \(y\), et le binôme obtenu est de la forme \(x^k*y^{n-k}\). Il reste à compter le nombre de fois où l’on obtient un tel binôme : c’est exactement le nombre de parties de \(k\) éléments dans un ensemble à \(n\) éléments, soit le coefficient binomial \(\binom{n}{k}\), car les parties et les combinaisons de \(n\) choix sont en bijection (en correspondance \(1-1\)). Voir la Figure 5.2 qui illustre l’arborescence des choix dans le cas \(n = 3\).

stateDiagram-v2
    state "+" as p0
    state "*" as m1
    state "*" as m2
    state "*" as m21
    state "*" as m22
    state "*" as m23
    state "*" as m24
    state "x³" as m31
    state "x²*y" as m32
    state "x²*y" as m33
    state "x*y²" as m34
    state "x²*y" as m35
    state "x*y²" as m36
    state "x*y²" as m37
    state "y³" as m38
    
    p0 --> m1: x
    p0 --> m2: y
    m1 --> m21: x
    m1 --> m22: y
    m2 --> m23: x
    m2 --> m24: y
    m21 --> m31: x
    m21 --> m32: y
    m22 --> m33: x
    m22 --> m34: y
    m23 --> m35: x
    m23 --> m36: y
    m24 --> m37: x
    m24 --> m38: y

Figure 5.2: Développement du binôme \((x+y)^3\)

\[ \begin{array}{rcl} (x + y)^n & = & \Sigma_{k=0}^n \binom{n}{k} * x^k*y^{n-k}.\\ \end{array} \]

\(n=0\) : \((x+y)^0 = \Sigma_{k=0}^0 \binom{0}{k} * x^k*y^{-k}\), car \(1 = 1\).

\(n\in\Nat{}\) : supposons \((x+y)^n = \Sigma_{k=0}^n \binom{n}{k} * x^k*y^{n-k}\). On a :

\[ \begin{array}{rcl} (x + y)^{n+1} & = & (x + y)*(x + y)^n, \\ & = & (x + y)*(\Sigma_{k=0}^n \binom{n}{k} * x^k*y^{n-k}),\\ & = & x*(\Sigma_{k=0}^n \binom{n}{k} * x^k*y^{n-k}) \\ & + & y*(\Sigma_{k=0}^n \binom{n}{k} * x^k*y^{n-k}), \\ & = & \Sigma_{k=0}^n \binom{n}{k} * x^{k+1}*y^{n-k}\\ & + & \Sigma_{k=0}^n \binom{n}{k} * x^k*y^{n+1-k}, \\ & = & \Sigma_{j=1}^{n+1} \binom{n}{j-1} * x^{j}*y^{n+1-j} \\ & + & \Sigma_{k=0}^n \binom{n}{k} * x^k*y^{n+1-k}, \\ & = & \binom{n}{n} * x^{n+1} \\ & + & \Sigma_{k=1}^n (\binom{n}{k} + \binom{n}{k-1}) * x^k*y^{n+1-k} \\ & + & \binom{n}{0} * y^{n+1}, \\ & = & \Sigma_{k=0}^{n+1} \binom{n+1}{k} * x^k*y^{n+1-k}. \\ \end{array} \]

On utilise l’égalité \(\binom{n+1}{k} = \binom{n}{k} + \binom{n}{k-1}\), qui se démontre ainsi : si on choisit un des éléments parmi les \(n+1\), il y a \(\binom{n}{k-1}\) parties de \(k\) éléments qui le contiennent, et \(\binom{n}{k}\) parties de \(k\) éléments qui ne le contiennent pas, et leur somme donne le nombre de parties de \(k\) éléments dans un ensemble de \(n+1\) éléments, soit \(\binom{n+1}{k}\).

Conclusion : pour tout \(n\in\Nat{}\), \((x+y)^n = \Sigma_{k=0}^n \binom{n}{k} * x^k*y^{n-k}\)

Remarque : la seconde égalité s’obtient soit en permutant \(x\) et \(y\), et en utilisant la commutativité, soit en sommant dans l’autre sens, \(\Sigma_{k=0}^n \binom{n}{k} * x^k*y^{n-k} = \Sigma_{j=0}^n \binom{n}{n-j} * x^{n-j}*y^{j}\), avec \(k = n-j\), et en remarquant que \(\binom{n}{k} = \binom{n}{n-k}\), du fait que les parties de \(k\) éléments et celles de \((n-k)\) se correspondent exactement, par complémentarité.

\[ \begin{array}{rcl} \puissance{}(x * y, n) & = & \puissance{}(x, n) * \puissance{}(y, n). \end{array} \]

Dans le produit \((x*y)^n\), il y a \(n\) occurrences de \(x * y\), donc \(n\) occurrences de \(x\) et \(n\) occurrences de \(y\). De même pour \(x^n * y^n\). Ces deux produits sont donc égaux.

On peut aussi facilement démontrer cette égalité par récurrence.

\[ \begin{array}{rcl} \puissance{}(-x, n) & = & (-1)^n * \puissance{}(x, n). \end{array} \]

L’opposé de \(x\), \(-x\), est égal aussi au produit \((-1) * x\), du fait que \((1 + (-1)) * x = x + (-1) * x = 0\). Ainsi on peut utiliser la loi de multiplication pour la base.

\[ \begin{array}{rcl} \puissance{}(1/x, n) & = & 1/\puissance{}(x, n). \end{array} \]

On utilise le fait que l’inverse est un morphisme multiplicatif : \(1/(x * y) = (1/x) * (1/y)\).

On peut alors facilement démontrer cette égalité par récurrence.

Exercise 5.4 (Lois pour l’exposant) Étudier la préservation de la structure algébrique de l’exposant (le second argument de la fonction \(\puissance{}\)).

  • Addition pour l’exposant : \(\puissance{}(x, n + p) = \ldots\) ?
  • Multiplication pour l’exposant : \(\puissance{}(x, n * p) = \ldots\) ?

\[ \begin{array}{rcl} \puissance{}(x, n + p) & = & \puissance{}(x, n) * \puissance{}(x, p). \end{array} \]

Dans le produit \(x^{n+p}\), il y a \(n+p\) occurrences de \(x\), donc \(n\) occurrences de \(x\) suivies de \(p\) occurrences. De même pour \(x^n * x^p\). Ces deux produits sont donc égaux.

On peut aussi facilement démontrer cette égalité par récurrence.

\[ \begin{array}{rcl} \puissance{}(x, n * p) & = & \puissance{}(\puissance{}(x, n), p),\\ & = & \puissance{}(\puissance{}(x, p), n).\\ \end{array} \]

Dans le produit \(x^{n*p}\), il y a \(n*p\) occurrences de \(x\), donc \(n\) occurrences de \(x\) répétées \(p\) fois ou \(p\) occurrences de \(x\) répétées \(n\) fois. De même pour \((x^n)^p\) et \((x^p)^n\) respectivement. Ces produits sont donc égaux.

On peut aussi facilement démontrer ces égalités par récurrence. Voici un exemple pour l’égalité \(x^{n*p} = (x^n)^p\).

\(n = 0\) : \(x^{0*p} = (x^0)^p\), car \(1 = 1^p\).

\(n\in\Nat{}\) : supposons \(x^{n*p} = (x^n)^p\). On a :

\[ \begin{array}{rclcl} x^{(n+1)*p} & = & x^{n*p + p}, \\ & = & x^{n*p} * x^p, & \quad & \textrm{addition / exposant}\\ & = & (x^n)^p * x^p, & \quad & \textrm{hypothèse de récurrence}\\ & = & (x^n * x)^p, & \quad &\textrm{multiplication / base}\\ & = & (x^{n+1})^p.& & \textrm{définition récursive}\\ \end{array} \]

Conclusion : pour tout \(n\in\Nat{}\), \(x^{n*p} = (x^n)^p\).

On dit qu’une loi est naturelle lorsqu’elle correspond à un morphisme.

Exercise 5.5 (Fonction puissance : lois naturelles) Recenser toutes les lois naturelles pour la fonction \(\puissance{}\).

  • Définition récursive :
    • \(x^0 = 1\),
    • \(x^{n+1} = x * x^n\).
  • Morphisme multiplicatif pour la base :
    • \((x * y)^n = x^n * y^n\).
  • Morphisme pour l’opposé variant avec la parité :
    • \((-x)^{2*n} = x^{2*n}\),
    • \((-x)^{2*n + 1} = - x^{2*n+1}\).
  • Morphisme inversif pour la base :
    • \((1/x)^n = 1/x^n\).
  • Morphisme additif/multiplicatif pour l’exposant :
    • \(x^{n + p} = x^n * x^p\).
  • Morphisme multiplicatif/compositionnel pour l’exposant :
    • \((x \mapsto x^{n * p}) = (y \mapsto y^p) \circ (x \mapsto x^n)\),
    • \((x \mapsto x^{n * p}) = (y \mapsto y^n) \circ (x \mapsto x^p)\).

Pour le dernier morphisme, on utilise la composition3 des fonctions puissance pour traduire le produit des exposants : ainsi la fonction puissance se distribue bien sur le produit. C’est une simple reformulation des égalités \(x^{n * p} = (x^n)^p = (x^p)^n\) dans le but de mettre en évidence le morphisme.

Les théories mathématiques se développent souvent en recourant à la généralisation et à l’abstraction. On cherche à généraliser la définition de la fonction \(\puissance{}\) de manière à ce qu’elle puisse s’appliquer à des exposants qui soient non seulement des entiers naturels, mais aussi

  • des entiers relatifs (entiers positifs et négatifs) et
  • des rationnels (les fractions).

La définition naturelle initiale, où \(x\) apparaît \(n\) fois, devient insensée : que pourrait signifier \(-5\) apparitions de \(x\), ou une demie apparition de \(x\) ? La solution pour généraliser est alors de proposer les extensions possibles qui permettent de préserver toutes les lois naturelles. On exclut de ces lois naturelles à préserver la définition récursive qui ne peut concerner que les entiers naturels puisqu’elle repose sur l’induction (le principe de récurrence) et doit plutôt être vue comme la définition mathématique originelle de la fonction puissance.

Exercise 5.6 (Extension aux entiers relatifs) Étant donné un entier naturel \(n\), en utilisant la caractérisation de l’opposé \(-n\) de \(n\) par l’égalité \((n + (-n) = 0)\), et la loi pour l’addition des exposants, donner une définition de \(\puissance{}(x, -n)\) et montrer qu’elle permet de préserver les lois naturelles.

Si la loi pour l’addition des exposants est préservée, on a alors :

\[ \begin{array}{rclcl} x^{n + (-n)} & = & x^0, \\ & = & 1, \\ x^{n + (-n)} & = & x^n * x^{-n}.\\ \end{array} \]

Ainsi \(x^{-n} = 1/x^n\). C’est la définition que nous retenons pour les entiers relatifs. Plus généralement, cette définition étend la fonction puissance par un morphisme transformant l’opposé des exposants en un inverse.

En combinant cette égalité avec la loi de l’inversion pour la base, nous obtenons l’égalité \(x^{-n} = (1/x)^n\), qui elle-même pourrait être déduite directement de l’égalité \(x^{-n} = x^{(-1)*n}\), en appliquant la loi de la multiplication pour l’exposant. Cependant, nous ne savons pas si elle est préservée par l’extension aux relatifs. C’est pourquoi nous étudions désormais la préservation des lois naturelles par cette première extension.

  • Morphisme multiplicatif pour la base.
    • \((x * y)^n = x^n * y^n\) : si \(n\) est négatif, on a bien l’égalité par commutation.
  • Morphisme pour l’opposé variant avec la parité.
    • \((-x)^{2*n} = x^{2*n}\) : si \(n\) est négatif, c’est immédiat, par inversion.
    • \((-x)^{2*n + 1} = - x^{2*n+1}\) : idem.
  • Morphisme inversif pour la base.
    • \((1/x)^n = 1/x^n\) car si \(n\) est négatif et égal à \(-p\), \[ \begin{array}{rclcl} (1/x)^{-p} & = & 1/(1/x)^p, & \quad & \textrm{(définition)} \\ & = & (1/(1/x))^p = x^p, & & \textrm{(morphisme inversif)} \\ & = & 1/x^{-p}. & & \textrm{(définition)} \\ \end{array} \]
  • Morphisme additif/multiplicatif pour l’exposant.
    • \(x^{n + p} = x^n * x^p\) : il suffit de procéder par cas, suivant le signe de \(n\) et de \(p\), et de \(n+p\) lorsqu’ils sont de signe opposé.
      • \(n > 0, p > 0\) : c’est le cas connu des entiers naturels.
      • \(n < 0, p < 0\) : on a \(x^{n + p} = x^{-((-n) + (-p))}\) et il suffit de développer en appliquant la définition de l’extension et les lois connues.
      • \(n > 0, p < 0, n + p \geq 0\) : on peut procéder par récurrence sur \(n\), à partir de \(-p\).
        • \(n = -p\) : on a bien \(x^0 = x^n * x^{-n}\).
        • Supposons \(n \geq -p\) et \(x^{n + p} = x^n * x^p\). On déduit \(x^{(n + 1) + p} = x^{(n + p) + 1} = x^{n + p} * x = (x^n * x^p) * x = x^{n + 1} * x^p\).
      • \(n > 0, p < 0, n + p < 0\) : on a \(x^{n + p} = x^{-((-n) + (-p))}\) et il suffit de développer en appliquant la définition de l’extension et les lois connues, dont celle précédente.
      • Les autres cas se ramènent aux deux précédents, par commutativité.
  • Morphisme multiplicatif/compositionnel pour l’exposant.
    • \(x^{n * p} = (x^n)^p = (x^p)^n\) : il suffit de procéder par cas, suivant le signe de \(n\) et de \(p\). C’est immédiat.

Exercise 5.7 (Extension aux rationnels) Étant donné un entier naturel \(n\) non nul, en utilisant la caractérisation de l’inverse \(1/n\) de \(n\) par l’égalité \((n * (1/n) = 1)\) et la loi pour la multiplication des exposants, donner une définition de \(\puissance{}(x, (1/n))\). Généraliser à toute fraction \(p/q\). Montrer que cette nouvelle extension préserve les lois naturelles.

Soit \(n\) un entier non nul. Si la loi pour la multiplication des exposants est préservée, on a alors :

\[ \begin{array}{rclcl} x^{n * (1/n)} & = & x^1, \\ & = & x, \\ x^{n * (1/n)} & = & (x^n)^{1/n},\\ & = & (x^{1/n})^n.\\ \end{array} \]

Autrement dit, les fonctions \((x \mapsto x^n)\) et \((x \mapsto x^{1/n})\) sont inverses (pour la composition) l’une de l’autre :

  • la réciproque de la fonction \((x \mapsto x^n)\) est la fonction \((x \mapsto x^{1/n})\),
  • la réciproque de la fonction \((x \mapsto x^{1/n})\) est la fonction \((x \mapsto x^{n})\).

Une fonction admet une réciproque (un inverse pour la composition) si et seulement si elle est bijective (en correspondance \(1-1\)) : tout élément de son ensemble d’arrivée doit avoir exactement un antécédent. Compte tenu de la loi de l’opposition pour la base, lorsque l’exposant \(n\) est pair, la puissance \(x^n\) est toujours positive, et a deux antécécédents, \((-x)\) et \(x\). En conséquence, il est nécessaire de restreindre le domaine de définition de la base aux réels strictement positifs, soit à \(\Reel{}_{>0}\). Pour \(n\) entier strictement positif, la fonction \((x \mapsto x^n)\) est alors strictement croissante, et pour \(n\) entier strictement négatif, la fonction \((x \mapsto x^n)\) est alors strictement décroissante. Dans les deux cas, la fonction est bien bijective.

Généralisons à une fraction \(p/q\). Comme \(p/q = p * (1/q)\), nous pouvons définir \(x^{p/q}\) par \((x^p)^{1/q}\) en appliquant la loi de la multiplication pour l’exposant.

Nous étudions désormais la préservation des lois naturelles par cette nouvelle extension aux fractions. On suppose que les bases sont strictement positives pour garantir la bijectivité et par conséquent la définition de l’extension.

  • Morphisme multiplicatif pour la base.
    • \((x * y)^{p/q} = x^{p/q} * y^{p/q}\), car les deux termes de l’égalité à la puissance \(q\) sont égaux.
  • Morphisme pour l’opposé variant avec la parité : non pertinent, car la base est supposée positive.
  • Morphisme inversif pour la base.
    • \((1/x)^{p/q} = 1/x^{p/q}\), car les deux termes de l’égalité à la puissance \(q\) sont égaux.
  • Morphisme additif/multiplicatif pour l’exposant.
    • \(x^{p_1/q_1 + p_2/q_2} = x^{p_1/q_1} * x^{p_2/q_2}\), car les deux termes de l’égalité à la puissance \(q_1 * q_2\) sont égaux.
  • Morphisme multiplicatif/compositionnel pour l’exposant.
    • \(x^{(p_1/q_1) * (p_2/q_2)} = (x^{p_1/q_1})^{p_2/q_2}\) : on procède en deux temps, en traitant d’abord le cas où \(p_2/q_2\) est un entier naturel \(n\), puis le cas général.
      • Démontrons \(x^{(p_1/q_1) * n} = (x^{p_1/q_1})^n\) par récurrence sur \(n\).

        • \(n = 0\) : \(x^0 = (x^{p_1/q_1})^0\).
        • Supposons \(n \geq 0\) et \(x^{(p_1/q_1) * n} = (x^{p_1/q_1})^n\). On a : \[ \begin{array}{rclcl} x^{(p_1/q_1) * (n + 1)} & = & x^{(p_1/q_1) * n + p_1/q_1}, \\ & = & x^{(p_1/q_1) * n} * x^{p_1/q_1},& \quad & \textrm{(morphisme additif)} \\ & = & (x^{p_1/q_1})^{n} * x^{p_1/q_1},& & \textrm{(hypothèse de récurrence)} \\ & = & (x^{p_1/q_1})^{n+1}. & & \textrm{(définition récursive)} \\ \end{array} \]
      • On a :

        \[ \begin{array}{rclcl} x^{(p_1/q_1) * (p_2/q_2)} & = & (x^{p_1 * p_2})^{1/(q_1*q_2)}, \\ (x^{p_1/q_1})^{p_2/q_2} & = & ((x^{p_1/q_1})^p_2)^{1/q_2}, \\ & = & (x^{(p_1 * p_2)/q_1})^{1/q_2}. & \quad & \textrm{(lemme précédent)}\\ \end{array} \] Les deux termes à la puissance \(q_1 * q_2\), soit d’abord à la puissance \(q_2\) puis à la puissance \(q_1\) sont égaux, d’où l’égalité.

stateDiagram-v2 
    direction LR
    state "x" as id
    state "xⁿ" as p

    id --> p: x ↦ xⁿ
    p --> id: x ↦ x¹⁄ⁿ 

    state "x" as id2
    state "x¹⁄ⁿ" as r

    r --> id2: x ↦ xⁿ
    id2 --> r: x ↦ x¹⁄ⁿ

Figure 5.3: Puissance n-ième et sa réciproque

Par la suite, pour garantir la définition des puissances avec un exposant rationnel, nous supposons la base positive, donc strictement positive puisqu’elle est supposée non nulle.

Exercise 5.8 (Exemple de la puissance un demi) Quelle est la fonction \((x \mapsto \puissance{}(x, 1/2))\) ?

Appliquons la définition de l’Exercise 5.7. La fonction puissance un demi, soit \((x \mapsto x^{1/2})\) est la réciproque de la fonction carrée, soit \((x \mapsto x^{2})\). Autrement dit, pour tout \(x\) réel positif, \(x^{1/2} = \sqrt{x}\) : c’est la racine carrée de \(x\).

D’un point de vue calculatoire, il est certainement bénéfique de remplacer la racine carrée par la puissance un demi : toutes les lois concernant la fonction puissance s’appliquent en effet sans exception.

Il reste à étendre la fonction \(\puissance{}\) à tout exposant réel.

Exercise 5.9 (Extension aux réels) Montrer que tout réel \(r\) peut être approché par deux suites adjacentes4 de rationnels, en utilisant l’écriture décimale de \(r\). Proposer alors une définition de \(\puissance(x, r)\) (étant donné un réels \(x\) positif). Quelles propriétés devrait-on montrer pour justifier cette extension ?

Un réel \(r\) peut être encadré à l’ordre \(k\) par deux nombres décimaux \(10^{-k} * p_k\) et \(10^{-k} * q_k\), où \(p_k\) et \(q_k\) sont deux entiers naturels vérifiant :

  • \(p_k + 1 = q_k\),
  • \(p_k \leq r * 10^k < q_k\).

Par exemple, pour le réel \(\pi\), nous avons les encadrements successifs suivants :

\[ \begin{array}{rcccl} 3 & \leq & \pi * 10^0 & < & 4, \\ 31 & \leq & \pi * 10^1 & < & 32, \\ 314 & \leq & \pi * 10^2 & < & 315, \\ 3141 & \leq & \pi * 10^3 & < & 3142, \\ 31415 & \leq & \pi * 10^4 & < & 31416, \\ 314159 & \leq & \pi * 10^5 & < & 314160. \\ \end{array} \]

Les suites \((s_k) = (10^{-k} * p_k)\) et \((t_k) = (10^{-k} * q_k)\) sont croissante et décroissante, respectivement, \((s_k < t_k)\), et leur différence tend vers \(0\) : bref, elle sont adjacentes. De plus, elles convergent vers \(r\).

Comment définir \(x^r\) ? Si l’on peut montrer que les suites \((x^{s_k})_k\) et \((x^{t_k})_k\) sont également adjacentes, alors \(x^r\) se définit comme la limite commune de ces deux suites. Ainsi la fonction puissance se trouve étendue à tous les exposants réels.

Pour montrer la préservation de l’adjacence, nous procédons par étapes :

  • monotonie de \(((q \in \Rat) \mapsto x^q)\) (donc relativement à l’exposant) :
    • si \(x = 1\), la fonction est constante,
    • si \(x > 1\), la fonction est croissante,
    • si \(x < 1\), la fonction est décroissante,
  • continuité de \(((q \in \Rat) \mapsto x^q)\) en \(0\) :
    • \(\forall \varepsilon > 0, \exists \alpha > 0, \forall q \in \Rat{}, |q - 0| < \alpha \Rightarrow |x^q - x^0| < \varepsilon\)5.

Voir les démonstrations dans l’Exercise 5.10 et l’Exercise 5.11.

Par monotonie de \(((q \in \Rat) \mapsto x^q)\), les suites \((x^{s_k})_k\) et \((x^{t_k})_k\) sont l’une croissante, l’autre décroissante, l’une majorant l’autre. Par le théorème de convergence pour les suites monotones bornées, on déduit que les suites \((x^{s_k})_k\) et \((x^{t_k})_k\) sont convergentes vers \(l_s\) et \(l_t\) respectivement. Comme \(\lim_{k \rightarrow + \infty} (t_k - s_k) = 0\), par continuité de \(((q \in \Rat) \mapsto x^q)\) en \(0\), on a : \(\lim_{k \rightarrow + \infty} (x^{t_k - s_k}) = x^0\), puis \(\lim_{k \rightarrow + \infty} (x^{t_k}/x^{s_k}) = 1\), d’où l’adjacence et l’égalité des limites \(l_t\) et \(l_s\).

Par le même argument de continuité en \(0\), on peut montrer que pour toute suite \((u_k)_k\) de rationnels convergeant vers \(r\), la suite \((x^{u_k})_k\) converge vers \(x^r\) : cette valeur ne dépend pas du choix de la suite de rationnels.

Il nous reste à démontrer les deux arguments utilisés dans le prolongement par continuité des rationnels aux réels.

Exercise 5.10 (Monotonie de la fonction puissance relativement à l’exposant) Montrer que la fonction \(((q \in \Rat) \mapsto x^q)\) est

  • constante si \(x = 1\),
  • croissante si \(x > 1\),
  • décroissante si \(x < 1\).

Si \(x = 1\), elle est évidemment constante.

Supposons \(x > 1\). On traite d’abord le cas des entiers naturels puis celui des entiers relatifs, et enfin la cas général des rationnels.

  • Considérons deux entiers naturels \(n_1, n_2\) tels que \(n_1 \leq n_2\). Posons \(d = n_2 - n_1\). Montrons alors par récurrence sur \(d\) que \(x^{n_1} \leq x^{n_1 + d}\). Les deux cas en zéro et en un successeur sont immédiats du fait que \(x > 1\).
  • Considérons deux entiers relatifs \(z_1, z_é\) tels que \(z_1 \leq z_2\). Envisageons les quatre cas suivant le signe de \(z_1\) et \(z_2\).
    • \(z_1 \geq 0, z_2 \geq 0\) : c’est le cas de deux entiers naturels.
    • \(z_1 < 0, z_2 \geq 0\) : \(x^{z_1} \leq x^{z_2}\) car \(1 \leq x^{z_2 - z_1}\). C’est le cas des entiers naturels \(0\) et \((z_2 - z_1)\).
    • \(z_1 < 0, z_2 < 0\) : \(x^{z_1} \leq x^{z_2}\) car \(x^{-z_2} \leq x^{-z_1}\). C’est le cas des entiers naturels \((-z_2)\) et \((-z_1)\), avec \((-z_2) \leq (-z_1)\)$.
    • \(z_1 \geq 0, z_2 < 0\) : ce cas est impossible car on suppose \(z_1 \leq z_2\).
  • Considérons deux rationnels \(p_1/q_1, p_2/q_2\) tels que \(p_1/q_1 \leq p_2/q_2\), \(q_1 > 0\) et \(q_2 > 0\). Or \(x^{p_1/q_1} \leq x^{p_2/q_2}\) est équivalent à \(x^{p_1 * q_2} \leq x^{p_2 * q_1}\), du fait de la croissance des fonctions \((y \mapsto y^{q_1})\) et \((y \mapsto y^{q_2})\), ainsi que de leurs réciproques \((y \mapsto y^{1/q_1})\) et \((y \mapsto y^{1/q_2})\), du fait que \(q_1\) et \(q_2\) sont strictement positifs. On peut conclure à partir du cas des entiers relatifs \(p_1 * q_2\) et \(p_2 * q_1\), tels que \(p_1 * q_2 \leq p_2 * q_1\).

Conclusion : si \(x > 1\), la fonction \(((q \in \Rat) \mapsto x^q)\) est croissante.

Enfin, supposons \(x < 1\). On peut raisonner par symétrie. Considérons deux rationnels \(r_1, r_2\) tels que \(r_1 \leq r_2\). Comme \(x^{r_1} = (1/x)^{-r_1}, x^{r_2} = (1/x)^{-r_2}\), \((-r_2) \leq (-r_1)\) et \((1/x) > 1\), de l’étude précédente, on déduit \(x^{r_2} \leq x^{r_1}\).

Conclusion : si \(x < 1\), la fonction \(((q \in \Rat) \mapsto x^q)\) est décroissante.

Exercise 5.11 (Continuité en zéro de la fonction puissance relativement à l’exposant) La fonction \(((q \in \Rat) \mapsto x^q)\) est continue en \(0\).

Si \(x = 1\), la fonction est constante et donc continue. Supposons \(x > 1\).

Soit \(\varepsilon > 0\). On peut imposer \(\varepsilon < 1\). On cherche \(\alpha > 0\) tel que pour tout \(q \in \Rat{}\) vérifiant \(|q| < \alpha\), on ait \(|x^q - 1| < \varepsilon\). Si \(q \geq 0\), \(x^q \geq 1\), et il suffit d’avoir \(x^q < 1 + \varepsilon\), soit \(x < (1 + \varepsilon)^{1/q}\). Il existe \(\beta_1 > 0\) tel que si \(1/q \geq \beta_1\), alors \(x < (1 + \varepsilon)^{1/q}\), du fait que la fonction \((z \mapsto (1 + \varepsilon)^z)\) diverge en \(+\infty\). Si \(q \leq 0\), posons \(p = -q\). On a : \(x^q = (1/x)^p \leq 1\), et il suffit d’avoir \((1/x)^p > 1 - \varepsilon\), soit \(x^p < 1/(1 - \varepsilon)\), donc \(x < (1/(1 - \varepsilon))^{1/p}\). Il existe \(\beta_2 > 0\) tel que si \(1/p \geq \beta_2\), alors \(x < (1/(1 - \varepsilon))^{1/p}\), du fait que la fonction \((y \mapsto (1/(1 - \varepsilon))^y)\) diverge en \(+\infty\). Pour conclure, il suffit de prendre pour \(\alpha\) le minimum de \(1/\beta_1\) et de \(1/\beta_2\).

Le cas de \(x < 1\) est analogue.

5.2 Atelier : définir l’exponentielle et le logarithme

Grâce à l’étude précédente, nous disposons désormais d’une fonction puissance ainsi définie :

\[ \begin{array}{rcrcl} \puissance{} & : & \Reel{}_{>0}, \Reel{} & \rightarrow & \Reel{}_{>0} \\ && x, n & \mapsto & x^n. \\ \end{array} \]

Elle vérifie toutes les lois naturelles récapitulées dans l’Exercise 5.5. Cette fonction donne lieu à deux fonctions en fixant un des paramètres : si on fixe l’exponant \(n\), la puissance \(n\)-ième, et si on fixe la base \(x\), l’exponentielle en base \(x\). Nous nous intéressons désormais à cette famille de fonctions.

Definition 5.2 (Exponentielle) L’exponentielle en base \(b\) est la fonction de l’ensemble des réels vers l’ensemble des réels strictement positifs qui à \(x\) associe \(b^x\).

\[ \begin{array}{rcrcl} \expo{}_b & : & \Reel{} & \rightarrow & \Reel{}_{>0} \\ && x & \mapsto & b^x. \\ \end{array} \]

Exercise 5.12 (Dérivée de l’exponentielle) Soit \(b > 0\) une base. En calculant le taux de variation de \(\expo{}_b,\) montrer que si \(\expo{}_b\) est dérivable en zéro, alors elle est dérivable en tout réel \(x\) et il existe une constante \(k\) tel que \(\expo{}'_b = k * \expo{}_b\). En déduire qu’il existe une base \(e\) telle que \(\expo{}'_e = \expo{}_e\).

La dérivée d’une fonction \(f\) en \(x\) est définie comme la limite du taux de variation :

\[ f'(x) = \lim_{h \rightarrow 0} \frac{f(x + h) - f(x)}{h}. \]

Ici on obtient : \(\expo{}'_b(x) = \exp{}_b(x) * (\lim_{h \rightarrow 0} \frac{\exp{}_b(h) - 1}{h}\). Comme \(\exp{}_b(0) = 1\), on obtient : \(\expo{}'_b(x) = \exp{}_b(x) * \exp{}'_b(0)\).

Considérons la fonction \((x \mapsto \exp{}_b(t*x))\), où \(t\) est une constante non nulle. Calculons sa dérivée en \(x\) :

\[ \begin{array}{rcl} \lim_{h \rightarrow 0} \frac{\exp{}_b(t*(x + h))) - \exp{}_b(t*x))}{h} & = & \lim_{h \rightarrow 0} \frac{\exp{}_b(t*x + t*h)) - \exp{}_b(t*x))}{t*h} *t, \\ & = & \lim_{h' \rightarrow 0} \frac{\exp{}_b(t*x + h')) - \exp{}_b(t*x))}{h'} *t, \\ & = & \lim_{h' \rightarrow 0} \frac{\exp{}_b(t*x + h')) - \exp{}_b(t*x))}{h'} *t, \\ & = & \exp{}'_b(t*x) * t, \\ & = & \exp{}_b(t*x) * \exp{}'_b(0) * t. \\ \end{array} \]

Ainsi, si \(t = 1/\exp{}'_b(0)\), la fonction \((x \mapsto \exp{}_b(t*x))\) a pour dérivée elle-même. Posons \(e = b^t\). On a alors : \(\exp{}_b(t*x)) = e^x\).

On peut montrer assez simplement que la fonction \(\expo{}_b\) est convexe lorsque \(b > 1\) : autrement dit son taux de variation est croissant. Comme il est toujours positif (d’après l’Exercise 5.10), on peut en déduire que le taux de variation admet une limite en \(0\) : l’exponentielle de base \(b\) est bien dérivable en \(0\). On peut donc définir l’exponentielle naturelle ainsi.

Definition 5.3 (Exponentielle naturelle) L’exponentielle naturelle est l’unique fonction exponentielle \(\expo{}_{\valE{}}\) vérifiant

\[ \expo{}_{\valE{}}' = \expo{}_{\valE{}}. \]

Sa base \(\valE{}\) est appelée le nombre d’Euler. Le nom de la fonction est abrégé en \(\expo{}.\) et le qualificatif “naturel” est généralement omis.

Comment calculer une valeur approchée de \(\valE{}\)? On sait que

  • \(\expo{}(1) = \valE{}\),
  • \(\expo{}(0) = 1\) et \(\expo{}'(0) = 1\).

Une idée est d’approcher la fonction par une approximation linéaire à partir de \(0\) : la courbe est approchée par la tangente en \(0\). Ici l’approximation donne \(2\). Nous allons raffiner cette méthode en découpant l’intervalle entre \(0\) et \(1\), et en utilisant la propriété essentielle de l’exponentielle, à savoir qu’elle est égale à sa dérivée.

Exercise 5.13 (Approximation linéaire) Soit \(f\) une fonction dérivable en \(x_0\). Montrer qu’il existe une fonction \(\varepsilon\) vérifiant :

  • \(f(x_0 + h) = f(x_0) + h * f'(x_0) + h * \varepsilon(h),\)
  • \(\lim_{h \rightarrow 0} \varepsilon(h) = 0.\)

La dérivée de \(f\) en \(x_0\) est définie comme la limite du taux de variation :

\[ f'(x_0) = \lim_{h \rightarrow 0} \frac{f(x_0 + h) - f(x_0)}{h}. \]

Définissons la fonction \(\varepsilon\) par \(\varepsilon(h) = (f(x_0 + h) - f(x_0))/h - f'(x_0)\). On a :

  • \(\lim_{h \rightarrow 0} \varepsilon(h) = 0,\)
  • \(f(x_0 + h) = f(x_0) + h * f'(x_0) + h * \varepsilon(h).\)

Ainsi la fonction \((h \mapsto h * \varepsilon(h))\) représente l’erreur d’approximation entre la fonction \((h \mapsto f(x_0 + h))\) et la fonction affine \((h \mapsto f(x_0) + h * f'(x_0))\), soit en utilsant les abscisses relativement à l’origine et non à \(x_0\) : l’erreur d’approximation entre le point de la courbe \((x, f(x))\) et le point \((x, f(x_0) + (x - x_0) * f'(x_0))\) de la tangente en \(x_0\) est donnée par \(((x-x_0)) * \varepsilon(x-x_0))\).

Exercise 5.14 (Approximation du nombre d’Euler e) Soit \(n\) un entier naturel strictement positif. Montrer qu’il existe une suite \((\varepsilon_1, \ldots, \varepsilon_n)\) de fonctions tendant vers \(0\) en \(0\) et vérifiant pour tout entier naturel \(k\) entre \(1\) et \(n\),

\[ \expo{}(k/n) = \expo{}((k-1)/n) * (1 + 1/n) + (1/n) * \varepsilon_k(1/n). \]

Calculer \(\Sigma_{k = 0}^n \expo{}(k/n) * (1 + 1/n)^{n-k}\). En déduire que \((1+1/n)^n\) est une valeur approchée de \(\valE{}\). Implémenter une fonction qui approche \(\valE{}\) à une précision donnée en paramètre et renvoie la valeur approchée et le rang \(n\) de l’approximation.

D’après l’Exercise 5.13, en chaque point \((k-1)/n\), il existe une fonction \(\varepsilon_k\) telle que \(\expo{}(k/n) = \expo{}((k-1)/n) + (1/n) * \expo{}'((k-1)/n) + (1/n) * \varepsilon_k(1/n)\). Du fait de l’égalité \(\expo{}((k-1)/n) = \expo{}'((k-1)/n)\), on obtient l’égalité donnée.

AFFAIRE

Code
import math 

def approximationLineaireE(precision):
  e = 2
  n = 1
  while (math.fabs(e - math.exp(1)) >= 10**(-precision)) : 
    n = n +1
    e = (1 + 1/n)**n
  return (n, e)

pr = 2
i, e = approximationLineaireE(pr)
print("approximation à " + str(10**(-pr)) + " près : " + str(e) + " - nombre de termes : " + str(i) )

print("erreur : " + str(math.exp(1) - e))
approximation à 0.01 près : 2.7082819990713864 - nombre de termes : 135
erreur : 0.009999829387658643

La convergence est très lente : pour obtenir une précision à \(10^{-10}\), il faut calculer \(66\ 953\ 935\) termes ! Il est possible d’améliorer grandement la rapidité du calcul en approchant la fonction par un polynôme, non pas de degré un, mais d’un degré supérieur. On utilise alors un développement limité, une généralisation de l’approximation linéaire de l’Exercise 5.13 qui est étudiée dans le Supérieur :

\[ f(x_0 + h) = f(x_0) + \Sigma_{k = 1}^n (h^k/k!) * f^{(k)}(x_0) + h^n * \varepsilon(h). \]

Ci-dessous le développement se fait à l’ordre six et calcule une approximation meilleure en 100 itérations que celle qui utilise plus de 60 millions d’itérations, ou pour un nombre comparable d’itérations, elle permet d’avoir une précision de l’ordre de \(10^{-13}\) au lieu de \(10^{-2}\).

AFFAIRE

Code
import math 

def devExpZero(x, precision):
  somme = 1
  fact = 1
  p = 1
  d = p/fact
  i = 1
  while (d >= 10**(-precision)) : 
    fact = i * fact
    p = p * x
    d = p/fact
    somme = somme + d
    i = i+1
  return (i, somme)

n = 100
pr = 10
i, s = devExpZero(1.0/n, pr)
print("développement limité de 0 à " + str(1/n) + " à " + str(10**(-pr)) + " près : " + str(s) + " - nombre de termes : " + str(i) )

def approximationE(n, precision):
  e = 1
  pas= 1.0/n
  i, s = devExpZero(pas, precision)
  for k in range(0, n):
    e = e * s 
  return e


constanteE = approximationE(n, pr)
print("approximation de e avec " + str(n) + " itérations : " + str(constanteE) + " - erreur : " + str(math.exp(1) - constanteE))
développement limité de 0 à 0.01 à 1e-10 près : 1.0100501670841668 - nombre de termes : 6
approximation de e avec 100 itérations : 2.7182818284587196 - erreur : 3.255173908200959e-13

Exercise 5.15 (Etude de la fonction exponentielle) Etablir les variations et les limites de la fonction exponentielle et la représenter graphiquement. Comparer sa croissance avec les fonctions polynomiales.

  • Préambule - L’exponentielle est continue et indéfiniment dérivable.
  • Croissance - L’exponentielle est croissante, sa dérivée, soit l’exponentielle, étant positive. Elle est aussi convexe, sa dérivée seconde, soit l’exponentielle, étant poitive.
  • Limites
    • Sa limite est \(+\infty\) en \(+\infty\).
      • Démontration 1 : Tout réel \(x\) est égal à \(z + d\), avec \(z\) entier relatif, et \(d\) réel dans \([0, 1[\). On a : \(\valE{}^z \leq \valE{}^x < \valE{}^{z+1}\) par croissance de l’exponentielle. Il est donc possible de déduire la limite de l’exponentielle de celle de la suite extraite \((\valE{}^n)_n\), une suite géométrique de raison strictement supérieure à \(1\). Cette suite diverge vers \(+\infty\)6. Ainsi, pour tout \(\omega\), il existe un rang \(p\) tel que pour tout entier \(n > p\), \(\valE{}^n \geq \omega\), et donc pour tout réel \(x > p\), \(\valE{}^x \geq \omega\).
      • Démonstration 2 : par convexité, l’exponentielle est au dessus de chacune de ses tangentes, particulièrement celle en \(0\), d’équation \(y = x +1\). Ainsi pour tout \(x\), \(\valE{}^x \geq x + 1\), d’où la divergence.
      • Démonstration 3 (inspirée de la démonstration 2): l’étude de la fonction \((x \mapsto \valE{}^x - x)\) montre qu’elle a un minimum en \(0\), qui vaut \(1\). On retrouve ainsi l’inégalité précédente.
    • Sa limite est \(0\) en \(-\infty\).
      • Cette limite se déduit de la précédente par composition des limites : \[ \lim_{x \rightarrow -\infty} \valE{}^x = \lim_{x \rightarrow +\infty} \valE{}^{-x} = \lim_{x \rightarrow +\infty} 1/\valE{}^{x} = 0. \]
  • Croissance comparée
    • \(\lim_{x\rightarrow +\infty} \valE{}^x/x^n = +\infty\) (forme indéterminée \(+\infty/+\infty\)).
      • Démonstration 1 : en étudiant le rapport \(\rho\) entre les valeurs prises en \((x+1)\) et \(x\), et en comparant avec une suite géométrique. Pour tout réel strictement positif \(x\), on a \[ \rho(x) = \frac{\valE{}^{x+1}/(x+1)^n}{\valE{}^x/x^n} = \valE{} * \frac{1}{(1+1/x)^n}. \]

        Ainsi la limite de ce rapport en \(+\infty\) est \(\valE{}\). Soit \(q\) vérifiant \(1 < q < \valE{}\). Il existe \(x_0\) tel que pour tout \(x \geq x_0, \rho(x) > q\). Il s’ensuit que pour tout entier naturel \(k\),

        \[ (\valE{}^{x_0+k}/(x_0+k)^n) \geq q^k * (\valE{}^{x_0}/x_0^n). \]

        Soit \(x \geq x_0\). Le réel \(x\) peut s’écrire sous la forme \(x_0 + k + d\), avec \(k \in \Nat{}\) et \(d\in[0,1[\). On a la minoration suivante :

        \[ \begin{array}{rcl} (\valE{}^{x_0+k + d}/(x_0+k+d)^n) &\geq& (\valE{}^{x_0+k}/(x_0+k+1)^n),\\ &\geq& (1/\valE{})* (\valE{}^{x_0+k+1}/(x_0+k+1)^n),\\ &\geq& (1/\valE{}) * q^{k+1} * (\valE{}^{x_0}/x_0^n).\\ \end{array} \]

        Comme \(\lim_{k \rightarrow +\infty} q^k = +\infty\), on déduit de cette minoration de \((\valE{}^{x}/x^n)\) que \(\lim_{x\rightarrow +\infty} (\valE{}^{x}/x^n) = +\infty\).

      • Démonstration 2 : en étudiant les fonctions \((x \in \Reel{}_{\geq 0} \mapsto \valE{}^x - k * x^n)\) pour un \(k\) bien choisi. On sait déjà que \((x\mapsto \valE{}^x - x)\) est croissante et minorée par \(1\). On montre par récurrence que pour tout entier naturel non nul \(n\), la fonction \((x\mapsto \valE{}^x - x^n/n!)\) est croissante et minorée par \(1\).

        • \(n=1\) : déjà fait.
        • Supposons \(n \geq 1\) et \((x\mapsto \valE{}^x - x^n/n!)\) croissante et minorée par \(1\). La fonction \((x\mapsto \valE{}^x - x^{n+1}/(n+1)!)\) a pour dérivée \((x\mapsto \valE{}^x - x^n/n!)\), qui est toujours positive. La fonction est croissante et a pour minimum sa valeur en \(0\), soit \(1\).
        • Conclusion : pour tout \(n \geq 1\), \((x\in \Reel{}_{\geq 0} \mapsto \valE{}^x - x^n/n!)\) est croissante et minorée par \(1\).

        On déduit la majoration \((\valE{}^{x}/x^n) \geq x/(n+1)!\), d’où la limite infinie en \(+\infty\).

    • \(\lim_{x\rightarrow -\infty} \valE{}^x * x^n = 0\) (forme indéterminée \(0 * \infty\)).
      • Démonstration utilisant la composition des limites : comme \(\valE{}^x * x^n = (-1)^n * (-x)^n / \valE{}^{-x}\), on déduit que \(\lim_{x\rightarrow -\infty} \valE{}^x * x^n = \lim_{y\rightarrow +\infty} (-1)^n * y^n / \valE{}^y\), d’où par inversion de la limite précédente, le résultat.
Figure 5.4: Exponentielle (en rouge) et puissances 2 et 4 normalisées (familles \((x\mapsto x^n/n!)\) - en bleue)

Comme l’exponentielle est bijective, puisqu’elle est strictement croissante, elle admet une fonction réciproque.

Definition 5.4 (Logarithme naturel) La fonction exponentielle admet pour réciproque une fonction appelée logarithme naturel ou népérien et notée \(\logNat{}\).

\[ \begin{array}{rcrcl} \logNat{} & : & \Reel{}_{>0} & \rightarrow & \Reel{} \\ && x & \mapsto & y & \textrm{ tel que } &\valE{}^y = x. \\ \end{array} \]

stateDiagram-v2 
    direction LR
    state "x" as id
    state "exp(x)" as p

    id --> p: x ↦ exp(x)
    p --> id: x ↦ ln(x) 

    state "x" as id2
    state "ln(x)" as r

    r --> id2: x ↦ exp(x)
    id2 --> r: x ↦ ln(x)

Figure 5.5: Exponentielle et sa réciproque, le logarithme naturel

Exercise 5.16 (Propriétés du logarithme naturel) Déduire des propriétés de l’exponentielle toutes les propriétés du logarithme naturel, du fait de la réciprocité :

  • les lois algébriques,
  • la dérivée,
  • les variations,
  • les limites de la fonction logarithme,
  • la représentation graphique,
  • la croissance comparée avec les fonctions polynomiales.

Les bijections et leurs réciproques possèdent de nombreuses propriétés qui sont simples et intuitives, mais ne sont plus au programme du Lycée. Il est utile d’en connaître certaines pour bien comprendre les relations entre une fonction et sa réciproque pour les quelques couples connus : la fonction carrée et la racine carrée, l’inverse et elle-même, l’exponentielle et le logarithme. Soit \(f\) une fonction de \(A\) vers \(B\) et \(g\) sa réciproque de \(B\) vers \(A\).

  • Équations fondamentales - Pour tout \(x\) de \(A\), \(g(f(x)) = x\) et pour tout \(y\) de \(B\), \(f(g(y)) = y\).
  • Isomorphisme - Si \(f\) est un morphisme algébrique pour certaines opérations, alors \(f\) s’appelle un isomorphisme. Sa réciproque \(g\) est aussi un isomorphisme, pour les mêmes opérations, mais dans l’autre sens. Par exemple, si \(f(x+y) = f(x)*f(y)\), alors \(g(a*b) = g(a)+g(b)\).
  • Représentation graphique (pour les fonctions sur \(\Reel{}\)) - Les courbes représentant \(f\) et \(g\) s’obtiennent par une symétrie relative à la première bissectrice, la droite d’équation \(y = x\). En effet, le point \((x, f(x))\) a pour symétrique \((f(x), x)\), puisque la différence entre ces points est le vecteur \((f(x) - x, x - f(x))\), soit \((f(x)-x)*(1,-1)\), qui est orthogonal au vecteur \((1,1)\) et dont la moitié amène sur la première bissectrice au point \(((x+f(x))/2, (x+f(x))/2)\).
  • Dérivation - Si la fonction \(f\) est dérivable et ne s’annule pas, alors la fonction réciproque \(g\) est dérivable et sa dérivée vérifie : \[ g'(y) = \frac{1}{f'(g(y))}. \]
    • Démonstration 1 (géométrique) : au point \((y, g(y))\), la tangente est le symétrique de la tangente au point \((g(y), y)\), qui a pour pente \((1, f'(g(y)))\). La pente de la tangente symétrique est alors \((f'(g(y)), 1)\), soit sous la forme normale \((1, 1/f'(g(y)))\), si la dérivée de \(f\) ne s’annule pas.
    • Démonstration 2 : en dérivant les membres de la seconde équation fondamentale, on obtient : \(f'(g(y)) * g'(y) = 1\).
  • Lois algébriques - Comme l’exponentielle est un (iso)morphisme additif/multiplicatif, le logarithme népérien est un (iso)morphisme multiplicatif/additif.

    \[ \begin{array}{rcl} \valE{}^{x + y} & = & \valE{}^{x} * \valE{}^{y}, \\ \logNat{}(a * b) & = & \logNat{}(a) + \logNat{}(b). \\ \end{array} \]

  • Dérivation

    \[ \logNat{}'(x) = \frac{1}{\expo{}(\logNat{}(x))} = \frac{1}{x}. \]

    De manière plus générale, si \(u\) est une fonction, la dérivée de la fonction composée \((x \mapsto \logNat{}(u(x)))\) est la fonction \(u'/u\).

    Dérivée en \(1\) donnant une limite utile :

    \[ \logNat{}'(1) = 1 = \lim_{h \rightarrow 0} \frac{\logNat{}(1+h) - \logNat{}(1)}{h} = \lim_{h \rightarrow 0} \frac{\logNat{}(1+h)}{h}. \]

  • Variations - La fonction \(\logNat{}\) est strictement croissante.

  • Limites - Par symétrie :

    • la limite est \(+\infty\) en \(+\infty\),
    • la limite est \(-\infty\) en \(0^+\).

    Les démonstrations ci-dessous utilisent la caractérisation logique des limites.

    Démonstration en \(+\infty\). Soit \(\omega\) un réel. Comme pour tout \(x >0\), \(\logNat{}(x) \geq \omega\) est équivalent à \(x \geq \valE{}^\omega\) du fait de la croissance de l’exponentielle, on déduit que la limite est \(+\infty\).

    Démonstration en \(0^+\). Soit \(\omega\) un réel. Comme pour tout \(x >0\), \(\logNat{}(x) \leq \omega\) est équivalent à \(x \leq \valE{}^\omega\) du fait de la croissance de l’exponentielle, on déduit que la limite est \(-\infty\).

  • Croissance comparée

    • \(\lim_{x\rightarrow +\infty} \logNat{}(x)/x^n = 0\) (forme indéterminée \(+\infty/+\infty\)).
      • Démonstration utilisant la composition des limites - Comme \(x^n \geq x\) lorsque \(x \geq 1\), il suffit de traiter le cas \(n = 1\). On a : \((x \mapsto \logNat{}(x)/x) = (y \mapsto y/\valE{}^y) \circ (x \mapsto \logNat{}(x))\). Comme \(\lim_{x\rightarrow +\infty} \logNat{}(x) = +\infty\) et l’exponentielle domine l’identité en \(+\infty\), nous pouvons conclure.
    • \(\lim_{x\rightarrow 0^+} \logNat{}(x) * x^n = 0\) (forme indéterminée \((-\infty) * 0\)).
      • Démonstration utilisant la composition des limites - On a : \((x \mapsto \logNat{}(x) * x^n) = (y \mapsto -\logNat{}(y)/y^n) \circ (x \mapsto 1/x)\). Comme \(\lim_{x \rightarrow 0^+} 1/x = +\infty\) et \(\lim_{y \rightarrow +\infty} -\logNat{}(y)/y^n = 0\), on déduit la limite.
Figure 5.6: L’exponentielle et sa réciproque, le logarithme

Exercise 5.17 (Génération des fonctions exponentielles et logarithmes) Montrer que la fonction exponentielle en base \(b\) \(\expo{}_b\) vérifie pour tout réel \(x\) :

\[ \expo{}_b(x) = \expo{}(\logNat{}(b) * x). \]

En déduire que pour tout réel \(x\),

\[ \logNat{}(b^x) = x * \logNat{}(b). \]

On peut ainsi définir la fonction réciproque de toute exponentielle \(\expo{}_b\) :

\[ \log{}_b(y) = \logNat{}(y)/\logNat{}(b). \]

La fonction \(\log{}_b\) est appelée le logarithme en base \(b\).

D’après la loi naturelle vue pour les puissances, \((\valE{}^{\logNat{}(b)})^x = \valE{}^{\logNat{}(b) * x}\), ce qui donne la première égalité. En appliquant le logarithme aux deux membres de l’équation, on obtient \(\logNat{}(b^x) = x * \logNat{}(b)\).


  1. Implémenter est un anglicisme adopté par les informaticiens pour signifier “programmer en respectant une spécification”. C’est conforme au sens anglais et à l’étymologie, puisque le sens latin est de remplir ou d’accomplir.↩︎

  2. Liées aux calculs.↩︎

  3. La composition est notée \(\circ\) : si \(\fctn{f}{B}{C}\) et \(\fctn{g}{A}{B}\) sont deux fonctions, alors la fonction \(\fctn{f \circ g}{A}{C}\) est définie pour tout \(x\) dans \(A\) par : \((f \circ g)(x) = f(g(x))\).↩︎

  4. Deux suites sont adjacentes si l’une est décroissante et majore l’autre qui est croissante, et si leur différence tend vers zéro ou de manière équivalente lorsque elles sont strictement positives ou négatives à partir d’un certain rang, si leur rapport tend vers un. Sous ces hypothèses, deux suites adjacentes sont convergentes et ont même limite : c’est un corollaire du théorème de convergence pour les suites monotones bornées.↩︎

  5. La formulation logique des limites est au programme, mais c’est surtout au Supérieur qu’on exploite ce genre de définitions.↩︎

  6. Théorème connu, qu’on démontre facilement en utilisant l’inégalité de Bernoulli↩︎